mercredi 30 novembre 2022

Critique série - Andor, saison 1







Spoilers à venir !



Andor est le meilleur Star Wars de tous les temps. Oui, oui, je l'ai dit.

Ironique, considérant que c'est ce qui s'éloigne le plus de l'essence même de Star Wars parmi toutes les œuvres qui ont été crées dans cet univers. Absents sont les sabres lasers, les Jedi, les éléments de fantasy... Andor est une série de science-fiction pure et dure, au scénario peaufiné et réfléchi, à la réalisation impeccable, qui ne cherche pas à vendre des jouets ou attirer les enfants. Enlevez le nom Star Wars et ce scénario pourrait facilement être intégré dans un tout nouvel univers de science-fiction, mises à part quelques références évidentes au reste de la franchise. Puis déplacez cette série sur HBO et elle y trouve parfaitement sa place parmi le riche contenu de la chaîne.

On a ici une série qui sait prendre son temps pour développer ses personnages et leurs motivations, ce qui permet de livrer des récompenses assez incroyables dans les derniers épisodes de la saison. Les scénaristes ont choisi une approche un peu différente, pour raconter leur histoire, de ce qu'on est habitué de voir dans la plupart des séries télévisées de nos jours. Alors que nous connaissons très bien la façon de faire actuelle, qui est de développer une histoire de façon plus ou moins lente pendant une dizaine d'épisodes, ce qui crée un gigantesque climax dans le dernier épisode de la saison, Andor procède différemment. Bien que certaines parties de l'histoire suivent le schéma classique, les aventures du personnage titulaire sont explorées d'une façon différente, dans des mini arcs narratifs de 3 épisodes. Ainsi, les 2 premiers épisodes de chaque arc narratif sont toujours plus lents, mais permettent de développer les principaux personnages impliqués dans cette partie de l'histoire et de faire monter graduellement le suspense. Puis, le 3e épisode de chaque partie est là où la série va à 100 milles à l'heure : morts de personnages impliqués dans cette partie de l'histoire, résolution du problème principal, changement radical de la situation du personnage. Bref, on a des points culminants aux 3 ou 4 épisodes, et même encore plus vite que ça à la fin de la saison, avec seulement 2 épisodes entre les deux derniers climax de la saison.

La série réussit à faire quelque chose de très différent avec chacune de ces parties : on commence avec un thriller à la Jason Bourne, où Andor doit s'enfuir de Ferrix tout en évitant les hommes d'une agence de sécurité qui sont à sa recherche. S'ensuit un classique casse où Andor doit faire équipe avec un groupe de gens qu'il ne connaît pas pour cambrioler les réserves de crédits de l'empire. Puis, on tombe dans une ambiance de Prison Break alors que Cassian se retrouve enfermé dans une prison ultra sécurisée de l'Empire. Enfin, suivent les deux derniers épisodes, où presque toutes les intrigues convergent à nouveau vers Ferrix pour les funérailles de Maarva.

Les deux premiers épisodes de la série sont probablement les moins intéressants du lot, incluant beaucoup d'introductions aux différents personnages et enjeux. Cependant, dès le début, la différence entre cette série et le reste de Star Wars était déjà largement évidente, alors j'ai décidé de poursuivre l'aventure. Et je n'ai nullement regretté mon choix, car le 3ème épisode faisait déjà passer Andor à la prochaine vitesse : on s'y rend compte que la série est capable d'amener de la tension et du suspense de façon hyper efficace lorsque les enjeux sont élevés. J'étais scotché à ma télévision, ne sachant pas trop ce qui allait se passer par la suite. 

L'épisode du casse produit le même effet : la première moitié de l'épisode fait monter et monter la tension alors que la petite troupe infiltre la base de l'Empire. Aucune scène d'action n'est nécessaire pour provoquer cette tension alors que l'atmosphère et l'anticipation suffisent à nous tenir en haleine. Puis, tout part en couille et l'action commence. C'est dans cet épisode que j'ai compris que personne n'était à l'abri de la mort dans cette série (mis à part certains personnages que l'on sait qu'ils joueront un rôle dans le futur) : la majorité des compagnons de Cassian ont mordu subitement la poussière, parfois aussi stupidement qu'en se faisant écraser par des caisses qui n'étaient pas attachées, dans un vaisseau qui a dû accélérer à grande vitesse. 

L'arc narratif du pénitencier est également un point fort de la saison. J'ai vraiment aimé le design tout en blanc de la prison et son fonctionnement. Les histoires de pénitencier peuvent facilement sombrer dans des clichés à n'en plus finir, mais Andor évite ce piège. Les planchers qui peuvent électrocuter les détenus, les tuant sur le coup, sont bien pensés, de même que l'organisation de la prison, c'est-à-dire la façon dont les prisonniers sont divisés en différents groupes sur plusieurs étages. L'Empire a en plus trouvé une façon de faire coopérer ses prisonniers, créant une sorte de compétition entre les différentes équipes dans la fabrication de leurs pièces, qui résulte en des récompenses ou des conséquences selon leur rendement durant la journée. Bref, c'est clair que les scénaristes ont vraiment voulu apporter quelque chose de nouveau aux histoires de prison et ça a donné un fantastique résultat. La révélation, à la fin de la saison, que les pièces fabriquées par les détenus sont en fait des parties du canon de l'Étoile de la Mort, qui sera responsable de la mort d'Andor dans Rogue One, rend le séjour en prison du personnage encore plus significatif. 

Plusieurs acteurs laissent leur marque tout au courant de la saison. Il y a bien sûr Diego Luna, qui incarne le personnage titulaire et qui apporte une performance nuancée et subtile à son rôle, alors qu'on le voit s'approcher de plus en plus de la cause rebelle au fil des épisodes. Stellan Skarsgard est également un des grands acteurs de cette première saison et laisse sa marque en tant que Luthen Rael, leader d'un réseau rebelle clandestin. L'acteur doit alterner entre les deux personnalités de son personnage au courant de la saison et le fait avec brio. Son monologue de l'épisode 10, qui explique ses motivations et le coût de ses agissements, est l'une des parties les mieux écrites et actées de la saison et Skarsgard y donne son 100%. Mentionnons également Andy Serkis, qui fait une apparition surprise pour la partie de la série se déroulant dans la prison. En effet, il réussit à faire passer tellement d'émotions par les traits de son visage et il nous brise le cœur avec sa fameuse ligne "I can't swim". J'espère de tout mon coeur que son personnage reviendra pour la deuxième saison. Genevieve O'Reilly est également excellente dans son rôle de Mon Mothma.

Plusieurs autres acteurs laissent également leur marque, mais ça serait trop long de tous les nommer. C'est justement une grande force de la série : alors que d'autres scénaristes auraient pu ne pas accorder beaucoup d'importance à des personnages qui font des apparitions mineures, ceux d'Andor ont visiblement voulu que chaque personnage fasse sa marque. Ainsi, même les acteurs qui sont présents pour quelques minutes seulement sont convaincants dans leurs rôles, par exemple, un officier de l'empire que l'on voit discuter avec sa famille quelques heures avant sa mort, ce qui rendra cette dernière beaucoup plus percutante.

Cette attention aux détails démontre la compétence qu'ont ces scénaristes à développer un tout cohérent qui tient debout et où on peut détecter vraiment peu de failles. On voit que les responsables de la série ont de l'expérience, qu'ils ont un plan et qu'ils savent ce qu'ils font. En espérant que Disney leur laisse piloter d'autres projets dans le futur. 

Mention spéciale à la réalisation, qui est toujours excellente et convaincante. La série est vraiment belle dans tous ses aspects. Les effets spéciaux sont comparables à ceux du grand écran (le point de vue sur l'étoile de la mort à la fin de la saison est sublime, de même que le phénomène appelé The Eye sur Aldhani), la cinématographie est impeccable et j'ai aussi beaucoup aimé le jeu de couleurs, vibrantes tout au long de la saison.

Andor est donc une série de Star Wars qui aurait pu ne pas en être une, et c'est ce qui fait en partie son succès à mon avis. Les scénaristes se sont permis de s'éloigner des clichés fréquents de la saga pour nous emmener dans d'autres aspects plus sombres de cet univers. On a pu passer plus de temps à explorer les effets de la  tyrannie de l'Empire sur la population dans la vie de tous les jours. Le focus sur les personnages et leur émotions face à ce qu'ils vivent a permis de s'identifier plus facilement à eux qu'on le pourrait avec des Jedi qui sont presque des superhéros. L'ajout d'intrigues politiques avec Mon Mothma a également permis de découvrir un côté moins exploré de cet univers et de faire des parallèles avec le monde réel.

En bref, Andor me redonne espoir en l'univers Star Wars et tout le potentiel qui y est renfermé et j'ai extrêmement hâte de voir ce que les scénaristes vont nous présenter dans la deuxième et ultime saison. Commencer cette série malgré le peu d'intérêt que je lui portais est probablement l'une de mes meilleures décisions de 2022.

Note finale : 9.5/10